Testé pour vous : la formation des premiers secours en santé mentale de Côté cours

Nous sommes dix femmes ce lundi matin, 12 mars, dans la salle aménagée avec des canapés confortables du Dispositif habitat Côté cours (Le Havre, Seine-Maritime).  Guidées par Nathalie Paillette, une infirmière spécialisée en psychiatrie,  dynamique et  bienveillante, nous allons nous initier aux premiers secours en santé mentale.

Une session de formation se fait toujours en présentiel et dure deux jours. Aujourd’hui, notre groupe est composé majoritairement de personnes proches de l’univers du soin et de l’accompagnement . Cependant le profil des groupes varie, car les troubles psychiques concernent tous les milieux.

« J’ai souhaité suivre cette formation pour m’aider dans ma profession d’auxiliaire de vie dans le domaine de la santé mentale. Mon objectif est de mieux comprendre les maladies mentales, mieux détecter les risques et adopter le comportement le plus adapté », témoigne Jennyfer Delabarre.

Un européen sur quatre touché par un trouble psychique               

Pour démarrer la formation, Nathalie nous propose un exercice pour faire connaissance.  Nous recevons un bout de carton avec deux années inscrites. Nous devons raconter un souvenir lié à ces années, en nous concentrant sur les émotions éprouvées. Les émotions jouent un rôle central dans la définition des principaux troubles psychiques.

Selon l’association Premiers secours en Santé Mentale France , un européen sur quatre âgé de 16 à 85 ans est atteint d’un trouble psychique. Pendant la formation, nous allons aborder les quatre principaux troubles psychiques grâce à des séquences pédagogiques et  interactives, alliant apports théoriques et exercices pratiques.

Nathalie nous présente le plan d’action AERER, applicable à toutes les situations :

• A pour approcher la personne, évaluer et assister
• E pour écouter activement et sans jugement
• R pour réconforter et informer
• E pour encourager à aller vers des professionnels
• R pour renseigner sur les autres ressources disponibles

Deux jours pour mieux comprendre les troubles psychiques

Nous commençons notre parcours par les troubles dépressifs et bipolaires, qui touchent chaque année 10% des Français. Nathalie nous explique comment les identifier chez un proche et comment apporter de l’aide tout en adoptant la bonne posture : « Un bon secouriste accompagne la personne vers où elle veut aller. Il ne fait pas à sa place. Seule la personne peut connaître ce dont elle a besoin. », développe Nathalie.

Nous poursuivons notre exploration de la santé mentale avec les troubles anxieux.  Il s’agit des troubles les plus répandus au sein de la population, car ils touchent entre 15% et 21% des Français. Nathalie insiste  sur la différence entre l’anxiété, une émotion normale et  les troubles anxieux «qui viennent heurter le quotidien et affectent la capacité de la personne de mener à bien son travail et ses activités. »

Se mettre à la place de l’autre

Le lendemain matin, nous démarrons la journée avec un quiz pour réviser les notions abordées la veille, avant d’enchaîner sur les troubles psychotiques.  Même s’ils ne touchent qu’1,3% de la population, ils souffrent d’une stigmatisation forte  car il sont souvent associés, à tort, à un risque élevé de violence. « C’est faux, réagit Nathalie. Les personnes ayant un trouble psychotique ne sont pas plus violentes que la moyenne de la population. Vous avez plus de chance de vous faire agresser par votre boulanger. »

Un exercice pratique nous permet de nous mettre à la place d’une personne schizophrène qui entend des voix. Nous ne rentrons pas dans le détail ici, pour ne pas enlever la surprise si vous décidez de suivre la formation.

Après la pause déjeuner, nous abordons la dernière famille des troubles étudiés pendant la formation : ceux liés à la consommation de substances comme l’alcool ou d’autres drogues. Nous apprenons comment agir en cas d’intoxication et à éviter d’exprimer des jugements moraux car l’envie de s’en sortir ne peut venir que de la personne.

Une formation citoyenne

Notre formation est terminée. Nous voilà, secouristes en santé mentale. Nous recevons un certificat et repartons avec un manuel qui synthétise les concepts abordés. Elsa Le jeune, sophrologue, dresse un bilan très positif de ces deux journées : « C’est une formation citoyenne qui permet de porter un regard plus humain sur les personnes qui se battent chaque jour, les écouter sans les juger et aller vers une société plus inclusive et respectueuse. J’ai appris avec cette formation à faire la différence entre la crise et le trouble au quotidien, et je saurai mieux informer, renseigner et réorienter dorénavant. »

Texte et photos de Viviane Tronel